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Votre microbiote et vous - Partie II

  • Photo du rédacteur: Guy Adrian
    Guy Adrian
  • 27 sept. 2017
  • 5 min de lecture

Partie II : Malbouffeur ou végan

Je vous ai parlé, dans l'article précédent, du livre Le charme discret de l'intestin (Actes Sud, 2015). En tête des ventes, il a eu le mérite de renouveler le genre médico-littéraire grand public. Pendant cette période est arrivée une flopée de livres sur le thème "tripaille humaine et dysfonctionnement", comme ceux écrits par des professeurs de gastro-entérologie : L'intestin notre deuxième cerveau et L'intestin au secours du cerveau (Marabout-Santé, 2016). Le problème, pour un béotien comme moi est que ces ouvrages de vulgarisation écrits par d'éminents spécialistes sont proches, en fait, des publications destinées à leurs confrères : très techniques avec des énoncés et des conclusions en vrac. Evidemment, faire de la littérature n'est pas leur problème, déjà qu'ils prennent sur leur temps si précieux dédié à leurs patients, aux services hospitaliers, aux laboratoires de l'INSERM, plus quelques petits extras comme consultants pour des labos pharmaceutiques - mais ça ne nous regarde pas. De ce fait, ces livres techniques ne sont pas lus, mais consultés par thème, genre : "Je suis constipé, c'est le chapitre 5... Voyons un peu..." Au contraire, le livre de Miss Giulia Enders, qui d'après sa photo, semble aussi charmante que son texte, est un vrai régal pour le lecteur, plus agréable à mon sens, que nombre de niaiseries estampillées "rentrée littéraire 2017". C'est clair, captivant, un peu badin, précis mais pas vulgaire, même sur les sujets délicats. Tenez, page 26 : "Notre sphincter interne est un petit gars tout en muscles. Sa devise : quand il faut que ça sorte, il faut que ça sorte !". Ainsi, je savais presque tout sur mon système digestif, et, enthousiasmé par la découverte de ce continent perdu à l'intérieur de moi-même, j'ai acquis six ouvrages sur cet intestin plus d'autres sur les bactéries résidentes usuelles ou locataires furtives de l'endroit. Vous en trouverez la liste dans la rubrique Pile à Lire de ce blog.

Tout d'abord, il faut savoir que le terme "flore intestinale" pour désigner nos habitants de l'intérieur a été remplacé par : "microbiote". Selon les spécialistes, 100 000 milliards de bactéries (10^14) colonisent notre tube digestif (certaines sources parlent de 3 à 10 fois moins, mais ça fait quand même beaucoup). Tout cela pèse 1,5 kg chez l'adulte, heureusement que ça n'augmente pas puisque vous en perdez 10% chaque matin ! On connait 10 000 espèces de microbes dans notre corps, mais celles du microbiote intestinal ne peuvent pas être examinées par culture car elles sont tuées par l'oxygène de l'air, aussi, depuis 2000, on utilise après extraction de l'ADN de ces bactéries, le séquençage qui permet de détecter les présentes afin de définir leurs rôles. Ces petits êtres ont bien du mérite à travailler dans des milieux acides, comme "Helicobacter Pylori" (ulcères) ou dans le noir et sans air tel "Clostridium difficile" (diarrhées), mais elles sont là, et, si une seule vous manque, c'est pire, car vous risquez alors une MICI (Maladie Inflammatoire Chronique de l'Intestin) comme celle de Crohn (absence de Faecalibactérium Prausnitzii). Une chose certaine, c'est que les antibiotiques tuent très bien toutes ces pauvres bêtes, aussi sûrement que l'épilation du maillot détruit les morpions. Alors on s'abstiendra d'avaler de l'amoxicilline et tous les machins en "-illine" pour un simple rhume ou une angine virale. Un microbiote costaud, c'est l'assurance d'une santé de fer, d'un transit impeccable et de la joie de vivre qui va avec. En effet la sérotonine, neurotransmetteur qui vous rend heureux est à 90% fabriquée par votre intestin, de plus, les centaines de millions de neurones de ce deuxième cerveau collaboreront encore mieux avec celui du haut.

De toutes ces enrichissantes lectures, je me suis fait un résumé stocké dans le coin le moins délabré de mon cerveau, de façon à briller en société et dans les dîners en ville où il est très courant de parler d'intolérances alimentaires : gluten, lactose ou allergies et même divers syndromes comme celui du "boyau irritable" et des terribles MICI, telle la "rectocolite hémorragique". N'oubliez pas de télécharger quelques photos de colons et rectums sanguinolents, ça calmera les petits malins qui se croient invulnérables. Toutes ces discussions peuvent être complétées par des supputations sur les causes : stress, pollution, pesticides et malbouffe. C'est très consensuel, alors qu'avant, à table, les messieurs ne parlaient que de politique et bagnoles, les dames d'accouchements et de gamins. Désormais, le boyau règne en maître : "C'est l'intestin, vous dis-je !". Vous pourrez rejouer le Malade imaginaire, acte III scène 10, en remplaçant "le poumon" par "l'intestin", ce qui permettra de conseiller à tous, au lieu du "clystère" cher à Molière/Corneille, de procéder à une bonne transfusion fécale à réaliser par le haut (bouche) ou par le bas (rectum), selon votre préférence !

Donc, tout allait très bien pour moi, d'autant que Madame Bibi était devenue "Reine de France"... Non ? Alors, "Première Dame", non plus ? Bon, "Epouse du Président de la République en exercice", ça vous va ? Parfait...

Je parcourais à grandes enjambées le doux chemin d'une vie déjà bien remplie lorsque trois phlébites successives dans ma jambe droite m'ont jetées dans les affres du doute. Alerté, mon médecin référent m'a expédié chez l'angiologue qui a traité les effets par des injections d'anti-coagulants (petites aiguilles à se planter dans le ventre, plutôt rigolo à condition d'y aller franchement). Par contre, pour déterminer les causes?... C'était parti ! A moi les "spécialistologues" et les scanners, IRM, échographie, analyses, etc. Jusqu'à ce que le gastroentérologue proclame que j'avais du gras partout à l'intérieur bien qu'étant plutôt mince. Mon foie était aussi bien enveloppé de graisse : une "stéatose". Là, j'ai flippé car on venait de greffer le journaliste Pierre Ménès, victime du syndrome NASH. Ce sympathique commentateur de football n'était pas passé loin, et, ç'aurait été dommage car il est un des rares à s'exprimer sur le foot-business et à ne pas forcément s'extasier devant le premier gamin venu des favellas de Rio ou des faubourgs d'Abidjan pour donner, moyennant un million d'euros mensuels quelques vagues coups de pied dans un ballon.

De mon côté, et en résumé, cette graisse abdominale provoquait l'émission de signaux de détresse dans tout mon corps, d'où ces phlébites et de la nécessité de pratiquer régime et exercices. Adieu, les aliments gras au bon goût ! Là-dessus est arrivée l'affaire L214 avec les abattoirs atroces, suivie des rapports sur la viande moche bourrée d'antibiotiques et les volailles fipronilées. Ça ne me disait plus rien, alors, j'ai tout changé. A présent, je chipote des salades quinoa-tomates-cerises et des steaks de soja, pas terrible ! Heureusement, je fais passer tout ça avec du vin issu de vignes travaillées à la main en biodynamie, un verre pas plus et je n'oublie pas les deux heures d'exercices et de cardio par jour. Résultat 6kg et deux crans de ceinture en moins. Pas mal non ? Je me sens en forme, minci, avec taux de cholestérol en baisse, fini les problèmes de jambes.

Voilà, ce n'est qu'un petit témoignage banal dans l'océan de la misère humaine, mais ça prouve qu'il ne faut en aucun cas se laisser aller à un abus de malbouffe. Occupez-vous bien de votre système digestif, en particulier de votre intestin et de son microbiote, ils vous le rendront au centuple !

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