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  • Photo du rédacteurGuy Adrian

"Trous de vers mangeurs de plastique"


On m'a alerté hier matin avec une information choc : "Il paraît qu'il y a des vers mangeurs de plastique, ils font des trous dedans !" pour moi, jusqu'ici, les trous de vers étaient des singularités à l'intérieur des "trous noirs", les fameux objets célestes faits de matière ultra-dense qui attrapent tout ce qui passe à leur portée : étoiles, astéroïdes et vaisseaux spatiaux dans les films hollywoodiens. Je parle de tout ça dans mon excellent livre Marylin et l'Ange turfiste paru en mars qui connait un franc succès.

Revenons aux "vers plasticophiles". Sur les écrans, une vidéo montrait des larves grouillant sur des bouts de plastique troués, on affirmait qu'elles le mangeait. Toutes les chaînes d'info montraient les images entre deux émissions consacrées aux électeurs de Mélanchon et au duel Le Pen-Macron, qui des deux allait gagner "la bataille d'image" à Amiens ?

Une heure plus tard, j'en savais plus : une chercheuse Mme. Frederica Bertocchini (en blouse blanche sur les vidéos), apicultrice à ses heures avait récolté des chenilles de "fausses-teignes" de la cire. Les bestioles parasites, enfermées dans un sac plastique en polyéthylène avaient percé le sacs en quelques heures. Ainsi, elles avaient mis à leur menu, au lieu de la bonne cire naturelle d'abeilles, du vulgaire plastique moche, celui qui souille nos campagnes, nos rivières et nos mers. Des "études avaient confirmé" cette observation. Le reportage se terminait sur des prévisions optimistes : les scientifiques vont isoler les substances qui permettent à ces teignes de digérer le plastique (polyéthylène et polypropylène), monter des installations ad-hoc, et la Terre sera plus propre !

Bien, là, le chimiste que je suis pense que ça n'est pas évident ! Le polyéthylène des sacs est fait de carbone et d'hydrogène :

-(CH2-CH2)-xn

n est un grand nombre. Les liaisons -C-C- et -C-H- sont solides, c'est pour cela que ce plastique n'est pas biodégradable, qu'il restera dans la nature pendant des siècles et qu'il se détruit en donnant des petits morceaux dangereux pour la faune aquatique.

La cire d'abeille est formée à 80% d'esters d'acide gras de formule :

R-CO-O-R'

où R est une chaine entre 18 et 36 atomes de carbone et R' est un alcool à 24-36 atomes de carbone. Vous voyez vu qu'il y a des liaisons carbone-oxygène beaucoup plus faciles à couper. Ces fausses-teignes ont probablement des enzymes (estérases) pour faire ce travail avec la cire, mais pas sûr qu'elles puissent couper les chaines carbonées du polyéthylène. C'est mon avis, je peux me tromper, mais pas mal d'histoires du passé m'inclinent à être prudent. A chaque fois, qu'on avait fait une découverte extraordinaire le monde était sauvé, on s'excitait et pschitt... Rappelez-vous :

- Moteur à eau : 1973

- Avions renifleurs de pétrole : 1975

- Mémoire de l'eau : 1988

- Fusion froide : 1989

Je passe sur les innombrable procédés miracles pour faire du pétrole à pas cher avec des algues, des déchets et n'importe quoi. Alors prudence ! Heureusement, d'autres données semblent plus sérieuses. Mme Bertocchini a publié avec ses collègues du CSIC, centre de la recherche espagnole, dans la revue Cell : "Biodégradation du polyéthylène par les chenilles de Galleria Mellonella", celles de la vidéo. La dégradation se fait en éthylène glycol par un mécanisme bactérien non précisé. L'extrapolation montre que 100 chenilles mettraient 1 mois pour digérer totalement un sac plastique de 5 grammes. Comme on utilise 300 millions de tonnes de plastique par an, il va falloir beaucoup de bestioles !

Faire des vidéos sympas, pour faire le buzz, c'est bien, mais vérifier ce qui a été fait avant (bibliographie), c'est encore mieux ! En effet, des chercheurs chinois en 2014 avaient publiés sur la dégradation du polyéthylène par des bactéries présentes dans les intestins des chenilles asiatique elle aussi mangeuse de cire.

Là, on se sent plus serein, car cultiver dans un environnement protégé des bactéries, on sait faire, ce qui permettra, à terme, de rendre ces déchets biodégradables.

On progresse !

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